A l'occasion de l'exposition "L'Islande Autrement... arts et tradition" du 2 au 30 juillet à Strasbourg, j'ai traduit le texte qui accompagne une partie des toiles que je présente. Ecrit en anglais, le voilà donc dans ma langue maternelle.
Le cœur de la montagne, dans le reflet du miroir
Les légendes islandaises regorgent de créatures mythiques – jarðvergar (gnomes), álfar (elfes), ljósálfar and dopkalfar (elfes lumineux et elfes sombres), dvergar (nains), ljúflingar (mignons), tìvar (esprits de la montagnes), englar (anges) et huldufólk (peuple caché).
Il faut avouer que le climat et le paysage, rude et sauvage, de l’Islande se prêtent volontiers à ce genre de superstition. Le décor, aussi sublime qu’envoûtant, avec ses champs de lave pourpre habillés de mousse verdoyante, les fumerolles des zones géothermiques, le brouillard fréquent, le silence des hauts plateaux ….. laisse facilement l’imagination vagabonder dans ce paysage idyllique. J’ai été fascinée par la légende du peuple caché et j’y ai puisé la source de mon inspiration pour une série de toiles.
Selon la tradition, le peuple caché a la même apparence physique que les êtres humains. Bien que ces habitants invisibles vivent dans des collines, rochers ou falaises leurs maisons ressemblent beaucoup aux demeures modernes des hommes. À la campagne, le peuple caché élève des vaches, moutons et autres animaux domestiques et généralement ses occupations sont semblables à celles de l’homme.
Les origines du Peuple caché
« Un jour, Dieu Tout Puissant vint rendre visite à Adam et Eve. Ils lui firent bel accueil et lui montrèrent tout ce qu’ils possédaient dans leur maison, y compris leurs enfants, qu’Il trouva pleins d’avenir et d'espoir. Il demanda alors à Eve s’ils n'avaient pas d’autres enfants que ceux qu’elle lui avait montrés. Elle dit que non. Mais il se trouve qu’Eve n’avait pas eu le temps de tous les laver. Honteuse de les présenter à Dieu non débarbouillés, elle les avait cachés. Dieu le savait, et dit : « Ce qui doit m’être caché sera caché aux hommes. »
Sur le champ, les enfants non lavés furent rendus invisibles et trouvèrent refuge dans les monts et les hauteurs, les grottes et les pierres. De là viennent les elfes, tandis que les hommes sont de la lignée directe des enfants qu’Eve montra à Dieu. Ainsi, les elfes sont invisibles aux yeux des humains - sauf pour les yeux des humains clairvoyants, ou lorsque les elfes eux-mêmes souhaitent se montrer. Le peuple caché - c’est le nom donné aux elfes - n’est habituellement ni amical ni hostile envers les humains. Il récompense ceux qui sont bons pour lui, mais il est également très vindicatif si vous lui faites du mal ou le dérangez. Pour cette raison il peut être très dangereux de s’ingérer dans sa vie amoureuse.
Evolution de mon nouveau travail
1. Le monde invisible
Au Coeur de la Montagne, Acrylique sur toile, 200x40cm, Avril 2009
Travaillant sur le thème d’un peuple caché et d'un monde invisible, je me suis attelée à une série de peintures dans lesquelles les montagnes ne sont pas dépeintes simplement en tant que reliefs élevés composés de roches et de terre mais comme terre d’accueil des mondes cachés. La peinture Au cœur de la Montagne, par exemple, s’ouvre sur un monde au sein de la montagne, dans lequel le spectateur est attiré. La toile est née de coulées successives de peinture dont la superposition crée la profondeur.
Au cœur de la Montagne, exemple de coulées de peinture
Par delà la Montagne Bleue, Acrylique sur toile, 180x48cm, Avril 2009
Par delà la Montagne Bleue, détail
J’ai adopté une approche similaire pour la toile Par-delà la Montagne Bleue. Dans le détail de peinture ci-dessus, vous pouvez voir que la montagne abrite d’étranges oiseaux, inspirés par l’observation des cormorans dans les fjords de l’ouest. C’est aussi un clin d’œil à Blafjöl (ou Blafjall), les Montagnes Bleues (non loin de Reykjavík), où dorment toute l'année les treize Jólasveinar. Une légende raconte que 13 jours avant Noël, 13 Pères Noël (il s'agit plutôt de lutins farceurs descendants de trolls) quittent leurs montagnes un par un du 12 au 24 décembre et viennent visiter les gens pour leur jouer des tours.
Derrière la Colline de Mousse - troisième peinture qui complète la série – joue sur le même thème d'un monde caché au cœur de la montagne. Les couleurs vives traduisent l’imaginaire, tandis que des couleurs plus terrestres comme le noir et le vert rappellent les champs de lave et de mousse, deux éléments inséparables dans les paysages islandais. Les croyances et les histoires sur les créatures cachées sont encore très vivaces en Islande : les locaux connaissent les rochers susceptibles d’être habités par des elfes et nombre de formations rocheuses ou de lave ont des légendes qui leur sont attachées.
Derrière la Colline de Mousse, Acrylique sur toile, 200x50cm, Mai 2009
Derrière la Colline de Mousse, détail
2. Paysages islandais
Dans des peintures de paysage plus traditionnelles, telles Sur le chemin de Borgarvirki et Vaðlaheið, la même idée d'un monde caché prédomine, mais d'une manière moins évidente. Dans le tableau Sur le chemin de Borgarvirki le reflet imparfait, dans l’eau, des montagnes couvertes de glace, invite le spectateur à les considérer comme deux mondes, similaires et différents à la fois.
Sur le Chemin de Borgarvirki, Acrylique sur toile, 200x100cm, Avril 2009
La profondeur de la montagne Vaðlaheið et son reflet infini dans l’eau traduit toujours cette idée d'un monde réel, mais qui, néanmoins, pourrait accueillir une vie cachée. Au printemps, la fonte des neiges et des glaces sur les massifs réhausse le caractère vivant de la montagne. Les coulées de neige sculptent la montagne et ressemblent à des veines dont le sang à la blancheur immaculée apporte la vie. Les perpétuels changements de couleurs dans le ciel donnent aux lacs et à l’océan des tons scintillants, et une profondeur qui invite le spectateur à s'interroger sur les vies cachées qu’ils abritent.
Vaðlaheið, Acrylique sur toile, 200x100cm, Mars 2009
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